Biogaz : la filière gazière redoute un coup de frein du prochain gouvernement

Réunis pour leur congrès annuel ce jeudi, les gaziers entendent être partie prenante de la transition énergétique. Si l'électrification est nécessaire à long terme, ils mettent en avant leur contribution aux objectifs de décarbonation à court terme.
La filière gazière ne veut pas être la grande oubliée de la transition énergétique. Face aux incertitudes politiques, qui ont laissé de nombreux chantiers en suspens, France Gaz, qui organise son congrès annuel ce jeudi, met la pression pour obtenir, a minima, des garanties sur la neutralité technologique. « Nous ne remettons pas en cause l'électrification, qui sera nécessaire, mais la molécule peut être l'un des moyens les plus rapides de décarbonation, à court terme », explique son président Frédéric Martin.
La filière affiche son dynamisme, avec 20 % de nouveaux adhérents à France Gaz sur la dernière année et des objectifs atteints en termes de production de biométhane : les capacités d'injection dans les réseaux devraient être portées à 16 TWh à la fin de l'année, contre 14 TWh en fin d'année dernière. L'objectif, selon la dernière version de la programmation pluriannuelle de l'énergie qui n'a toujours pas été publiée, devrait être fixé à 44 TWh de biométhane injecté à l'horizon 2030, soit 15 % de la consommation.
Il faudra donc accélérer et passer de 2 à 6 TWh de nouvelles capacités par an d'ici à la fin de la décennie. Un saut important pour lequel France Gaz affirme être prêt. « Nous avons eu un creux des projets avec la baisse des tarifs de rachat, mais la dynamique est repartie depuis l'an dernier », souligne Frédéric Martin.
Un coût pour les finances publiques
Pour atteindre ces objectifs, la filière aura toutefois besoin d'un soutien continu de l'Etat. Ce qui pourrait s'annoncer compliqué en ces temps de restrictions budgétaires. La Cour des comptes pointait il y a quelques mois la facture salée pour les dépenses publiques du soutien à la méthanisation. Le coût était de 1,1 milliard d'euros l'an dernier. Et, pour les douze prochaines années, la Cour évaluait la facture pour les tarifs d'achat entre 22 et 27 milliards d'euros. Supérieure, selon les prévisions, au montant du soutien au solaire ou à l'éolien…
22 à 27 milliards d'euros Le montant de la facture, pour les finances publiques, pour le tarif d'achat du biométhane dans les douze prochaines années, selon la Cour des comptes.
« Il faut aussi prendre en compte l'impact sur les territoires, la filière agricole… Il est vital de conserver un prix minimum garanti pour continuer à avoir un flux de projets important. Il faut que le prochain projet de loi de finances en tienne compte et qu'il permette d'atteindre les objectifs de la PPE », répond Frédéric Martin, selon qui les certificats de production de biogaz (CPB) doivent permettre à terme de développer un véritable marché, moins dépendant des tarifs d'achat.
Là aussi, la Cour des comptes alertait sur de possibles distorsions du marché, ces CPB se retrouvant potentiellement aux mains de deux ou trois grandes entreprises, comme TotalEnergies ou Engie… En s'industrialisant, la filière risque de perdre ses bénéfices sociaux, pointe la Cour.
Neutralité technologique
Autre soutien attendu, moins conséquent celui-ci : le financement de l'innovation. La filière craint que la France ne prenne du retard dans de nouvelles technologies, comme la pyrogazéification ou la gazéification hydrothermale, qui pourraient permettre de valoriser des résidus agricoles et des déchets. En début d'année, le projet Salamandre, porté par Engie et CMA CGM, a été abandonné, faute d'avoir trouvé suffisamment de soutiens financiers.