Accéder au contenu principal

Accident de méthaniseur : un million de litres de déchets s'échappe sur des terres cultivées


| France Info | News
Les résidus de pollution près du méthaniseur.

| France Info | News

Un accident a eu lieu sur un digesteur de l'usine de méthanisation Methabaz, à Bourgogne-Fresne (Marne). La préfecture publie un arrêté de mesure d'urgence concernant les installations de la société Methabaz. Les sources de captage d'eau pour le Grand Reims se trouvent à proximité des terres polluées.

C'est l'accident le plus important jamais survenu sur un méthaniseur. Un million de litres de digestat se sont répandus sur des terrains cultivés, suite à un accident de méthaniseur.

Ce dernier s'est produit le 17 février, à l'usine de méthanisation Méthabaz, située au lieu-dit Le Cri, à Bourgogne-Fresne, dans la Marne. Les terres polluées se trouvent à proximité des sources de captage d'eau pour l'agglomération du Grand Reims.

Les services de l'État précisent à France 3 Champagne-Ardenne qu'aucun captage d'eau potable n'a été impacté. Des mesures complémentaires ont été demandées à l'exploitant par mesure de précaution.

Un million de litres de digestat dans la nature

La société Methabaz est équipée de trois digesteurs. L'accident du digesteur 3 a provoqué la rupture d'une poche de 1 000 m3 de digestat liquide, soit 1 million de litres, qui se sont déversés en dehors du périmètre du site. Ils se sont répandus sur des terres cultivées, créant une grande nappe noire et visqueuse. Elle dégage une odeur pestilentielle.

Selon Sébastien Almagro, président de l'Association citoyenne de défense de la nature et des personnes contre les pollutions et les nuisances (ACDNPPN), qui se bat depuis des années contre cette usine de méthanisation, "les litres de digestat ont pénétré dans la terre. Ils se sont infiltrés dans le cours d'eau qui passe sous l'usine de méthanisation."

"Or ce cours d'eau alimente le captage d'eau d'Auménancourt situé à proximité de Bourgogne-Fresne. Il est probable qu'il y ait une pollution." D'où les craintes pour la captation de l'eau potable de l'agglomération de Reims. 

La préfecture déclenche la procédure d'urgence

Ce vendredi 28 février, la préfecture de la Marne a publié un arrêté. Dans celui-ci, elle demande à l'exploitant Méthabaz la réalisation d’un diagnostic.

Ce dernier doit permettre "d’évaluer précisément la consistance et l’étendue d’une éventuelle pollution, afin d’identifier les cibles potentielles ainsi que les voies de transfert". Elle lui demande de prendre toutes les mesures nécessaires pour sécuriser le site et notamment les digesteurs 2 et 3, dans lesquels est stocké du digestat, et qui sont fragilisés.

La préfecture rappelle que ce n'est pas le premier accident. Un précédent s'est produit le dimanche 9 février 2025. Elle demande donc à Méthabaz de s'expliquer.

Le digestat est-il dangereux ?

Le digestat est le résidu qui sort du digesteur à l'issue du processus de méthanisation. Il s'agit de la matière qui n'a pas été transformée en biogaz. En petite quantité, il peut être utilisé comme un compost. Mais en très grande quantité, il s'infiltre dans les cours d'eau et les nappes phréatiques.

Comme l'explique le service des eaux du Grand Reims sur son site Web, la qualité de l'eau dépend de la qualité des eaux de surface et de l'activité humaine. Du fait de la quantité de digestat échappée et des fortes pluies de ces derniers jours, la qualité des eaux de surface pourrait être affectée (voir emplacement sur la carte ci-dessous).

Il y a eu des précédents en France, notamment la pollution de l'eau à Châteaulin, en 2020. Près de 400 000 litres de digestat s'étaient échappés. Les habitants avaient été privés d'eau potable.

Inquiétude de la population

Sébastien Almagro s'inquiète. "Le digestat est une matière très azotée. Il s'est déversé à proximité d'une source de captage d'eau du Grand Reims qui fournit 25% de l'eau potable de la métropole. Une pollution pourrait avoir de graves conséquences sur la santé des consommateurs du Grand Reims, provoquer des nausées, des malaises, ou des problèmes digestifs."

Il se dit d'autant plus inquiet que l'association a alerté les pouvoirs publics à de nombreuses reprises sans jamais obtenir de réponse. " Le plus troublant", ajoute-t-il, "c'est que l'accident s'est produit le 17 février mais les services de l’Etat ne sont venus que le 25 février. Une semaine pendant laquelle nous ne sommes pas sûrs que des mesures de sécurité aient été prises."

Le maire de la commune, Nicolas Habare, confirme. "J'ai été averti seulement le 26 février par le sous-préfet. J’ai demandé les taux d’azote à l’ARS Grand Est et aux services eau et assainissement du Grand Reims, mais je n'ai pas obtenu de réponse", regrette-t-il.

Grand Reims : tout est sous contrôle

Dans un communiqué, la direction de l'eau et de l'assainissement du Grand Reims précise qu'"en lien étroit avec les services de l’État et notamment l’agence régionale de santé, et sur la base de l’expertise de l’hydrogéologue agréé en la matière, les captages du Grand Reims ne sont pas impactés à ce stade par l’événement."

"Un ensemble de mesures de précaution a été mis en œuvre. En ce qui concerne le captage de Bourgogne-Fresne, celui-ci ne dessert plus la commune depuis plusieurs mois, l’alimentation en eau potable de la population étant assurée par d’autres captages du Grand Reims."

"Il convient donc de conforter l’ensemble de la population de la commune que l’eau potable de la commune est conforme aux attentes sanitaires." L'agglomération se veut donc rassurante. 

Méthabaz prend des mesures

Dans un communiqué de presse, Méthabaz explique, qu'"accompagné par des experts, l'entreprise a immédiatement pris les mesures nécessaires pour contenir le déversement du digestat. Le pompage des bassins a rapidement été amorcé." Methabaz précise également que "les bassins sont actuellement débarrassés des deux tiers de digestat qui s’y trouvait. Par ailleurs, le curage et le nettoyage des espaces verts ainsi que des routes et des abords des bassins sont en cours afin de limiter les infiltrations dans le sol."
"Des mesures correctives complémentaires et des analyses régulières seront menées, en stricte conformité avec l’arrêté préfectoral et Méthabaz tirera tous les enseignements de cet incident.
Avec cette unité de méthanisation, Méthabaz souhaite être un acteur contribuant à l’économie circulaire mais aussi à l’énergie renouvelable par la valorisation des coproduits agricoles locaux. La préservation de l’environnement a été et reste un moteur de notre ambition de même qu’une exploitation responsable", ajoute l'entreprise dans son communiqué. 

Lobbying